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Légendes de la Terre-Mère par Zagethia Hache-Vive Contes et légendes du monde  <    Publications     > 
I — Corneblanche
Présenté par l'auteur lors de la 11e Marche des kodos, le 10e jour du 12e mois de l'an 36.
1.
C'était il y a bien longtemps. Corneblanche était un jeune kodo au cuir encore tendre, le plus jeune de ses frères et sœurs. Il suivait toujours sa mère la matriarche lors de ses lents voyages à travers les vastes prairies de Mulgore.
Un jour cependant, il partit seul, à la découverte du monde. Un court voyage pour commencer, car le monde est vaste et plein de dangers ; une demi-journée, pas plus. Mais, lorsqu'il rejoignit le troupeau, tout fier de son escapade, il ne trouva que sa mère, seule, couchée sur le flanc et agonisante.
Il se précipita vers elle.
— La vie me quitte, mon fils, parvint-elle à dire. Je meurs et personne n'y peut rien.
— Mère, s'écria le jeune kodo, ne puis-je vraiment rien faire pour te sauver ?
— Non mon fils, mais tu peux encore sauver tes frères et sœurs. Nous avons été attaqués par une horde de démons, des hommes-chevaux. Ils ont enlevé mes autres enfants et m'ont laissé pour morte, trop vieille que je suis pour eux.
— Je te vengerai, mère ! promit le jeune kodo.
— Non, Corneblanche, tu ne dois pas me venger. Tu dois plutôt sauver tes frères et sœurs. Mais seul, tu n'y arriveras pas.
— Mais à qui dois-je demander de l'aide alors ?
— Non loin d'ici vit le peuple des hommes-taureaux, ce sont nos amis. Ils sont puissants mais les hommes-chevaux, eux, sont nombreux, très nombreux, et il te faudra aussi l'aide du roi des Lézards-Tonnerre.
La matriarche fut secouée par une quinte de toux, puis reprit d'une voix faible.
— Mon fils, écoute-moi, il ne me reste plus beaucoup de temps. Dirige-toi vers le nord, il existe un campement tauren à quelques jours d'ici. Parle à leur chef, il te comprendra. Prends ma corne, ainsi il saura qui je suis. Ensuite, vous irez encore plus au nord, et tu montreras la corne à l'Esprit du Grand Lézard-Tonnerre, et lui aussi saura qui je suis.
La matriarche utilisa ses dernières forces pour s'arracher sa corne, puis doucement, elle dit :
— Va mon fils, ne perds pas de temps et retrouve tes frères et sœurs. Que la tristesse et la colère n'envahissent pas ton cœur, tu me pleureras après.
Puis la vieille kodo, la matriarche, mourut.

2.
Corneblanche ne réalisait pas encore que sa vie si paisible venait d'être bouleversée à jamais. Il prit cependant la corne de sa mère et s'en fut vers le nord. Mais il ne pouvait s'empêcher de pleurer, les larmes lui brouillaient la vue.
Il courut trois jours durant, s'arrêtant seulement pour manger et boire, refusant de dormir. Lorsqu'enfin il arriva, exténué, au campement des Taurens, il parvint jusqu'à la plus grande des tentes, puis s'écroula de fatigue.

Grande fut bien sûr la surprise des Taurens lorsqu'ils virent un jeune kodo arriver chez eux, chancelant, une corne dans la gueule, mais ils prirent soin de lui et calmèrent son cœur. Corneblanche demanda aussitôt à parler au chef, car en ce temps-là toutes les créatures de la Terre-Mère se comprenaient.
Un grand Tauren vint vers lui, et ramassa la corne de la Matriarche.
— Nous te saluons, jeune Kodo. Nous reconnaissons la corne que tu as portée, et ta fatigue témoigne d'un drame. Il est arrivé quelque chose à la matriarche.
— Bonjour, ô grand chef-homme-taureau, répondit le jeune kodo, intimidé et peu informé des usages des Shu'alo. Je m'appelle Corneblanche et ma mère est morte, et mes frères et sœurs ont été enlevés par les hommes-chevaux, et je dois les sauver ! Avant de mourir, ma mère m'a dit de vous trouver, et que vous m'aideriez à les libérer. C'est vrai, vous allez m'aider ?
— Hum, grogna le chef. Je vais réunir le Conseil des Anciens, et tu nous raconteras toute l'histoire.
Le lendemain, lors du Conseil des Anciens, Corneblanche raconta son histoire, avec la fougue que donne la jeunesse et la rage du désespoir. Les Taurens s'indignèrent du comportement des Centaures, certains allant même jusqu'à frapper violemment le sol de leurs sabots :
— Ces démons vont le payer ! maugréa l'un d'eux.
— Ils ne peuvent pas s'attaquer à des créatures de Terre-Mère impunément, surtout aux kodos, grogna un deuxième.
— Que veulent-ils faire des kodos, quel est leur but ? demanda un troisième. Je voudrais le savoir.
La discussion dura encore quelques minutes, puis le Grand Chef du clan Tauren prit la parole :
— Le Conseil est unanime. Nous allons t'aider, Corneblanche. Des guerriers de notre clan t'accompagneront, et vous partirez ensemble à la recherche de l'Esprit du Grand Lézard Tonnerre, comme l'a voulu la matriarche, car il ne sera pas dit que nous sommes restés assis à ne rien faire alors que des Centaures s'en prennent aux créatures de Terre-Mère !
Ainsi donc, Corneblanche, accompagné d'une petite troupe de Taurens en arme, se mit en route.

3.
Après plusieurs heures de marche, le groupe atteignit les contreforts d'une impressionnante montagne, bien plus haute que les collines herbeuses dans lesquelles avait grandi Corneblanche. Ils arrivaient au domaine des lézards-tonnerre, au cœur des Serres-Rocheuses. Reconnaissant la corne de la matriarche, les grands animaux les laissèrent passer et les guidèrent même vers l'un de leurs congénères, bien plus grand et majestueux que les autres, l'Esprit du Grand Lézard-Tonnerre.

Le grand Lézard-Tonnerre regarda longuement le groupe, puis, voyant la corne qu'un Tauren déposait humblement à ses pieds, il poussa un long soupir de tristesse.
— Ainsi, la Matriarche n'est plus. Et si vous êtes devant moi ce jour, c'est donc que sa mort n'a été ni douce ni naturelle.
— C'est la vérité, ô Grand Esprit-qui-foudroie, s'exclama Corneblanche, rassuré par la présence des farouches guerriers taurens. Des hommes-chevaux sont venus, et l'ont tuée, et ils ont enlevé mes frères et sœurs. Avant de mourir, elle m'a dit d'aller demander votre aide ainsi que celle des hommes-taureaux. Allez-vous m'aider ?
— La Matriarche était une amie chère, respectée de tous, et une immense tristesse m'envahit en écoutant tes paroles. Reposez-vous et laissez-moi la nuit pour réfléchir.
Le lendemain matin, Corneblanche et les Shu'alo retrouvèrent l'Esprit du Grand Lézard-Tonnerre. Celui-ci déclara :
— J'ai réfléchi sous les étoiles. Mes enfants et moi vous aiderons à libérer tes frères et sœurs, jeune kodo. Les Centaures connaîtront ma colère pour leur crime. Que cela soit ! Mettons-nous en route maintenant.
 
4.
La petite armée se mit donc en route, en direction de l'endroit connu pour être le territoire des Centaures. En chemin, ils rencontrèrent des kodos âgés qui avaient bien connu la matriarche. Décidés à la venger, ils se joignirent à eux.
Enfin, arrivés en vue des terres des hommes-chevaux, ils établirent un camp silencieux et sans feu pour une dernière nuit de repos.

C'est à l'aube que la charge fut menée.
L'Esprit du Grand Lézard-Tonnerre menait l'armée, entouré de ses enfants. A côté de lui, le jeune Corneblanche trottait fièrement, tentant d'aligner son pas en refoulant son chagrin. Et autour d'eux, un grand nombre de kodos, dont certains avaient pris les Taurens sur leur dos puissants.
L'un des guerriers taurens murmura à Corneblanche :
— Avant même de voir le courroux de la Terre-Mère fondre sur eux, les démons la ressentiront sous leurs sabots !
Et, en effet, les Centaures furent réveillés par ce qu'ils crurent être un tremblement de terre. Les kodos et les lézards-tonnerre chargeaient d'un pas lourd, dans un nuage de poussière. Lancés à pleine vitesse, martelant le sol et tête baissée, ils fondaient sur le campement ennemi, prêts à embrocher tout imprudent.
Qui n'a jamais assisté au terrible spectacle de la charge d'un kodo en colère ne peut imaginer l'effroi des Centaures. La plupart d'entre eux ne purent même pas se saisir de leurs armes avant d'être écrasés, ou foudroyés par les lézards-tonnerre. Les plus agiles tentèrent de s'enfuir, mais ils furent fauchés par les flèches des Taurens.

Lorsque la poussière fut retombée, Corneblanche put enfin chercher ses frères et sœurs, nourrissant l'espoir de les retrouver sains et saufs. Bientôt, il aperçut un enclos à l'écart. Et là, ses frères et sœurs étaient enfermés, ainsi que d'autres animaux. Il courut, plein de joie, et réussit à forcer la barrière pour libérer les captifs.
A ce moment-là, ils entendirent un hurlement terrifiant et virent surgir de l'une des rares tentes encore debout un immense Centaure au torse puissant couturé de cicatrices, aux yeux fous, et armé d'une lance à la lame dentelée.
Le champion centaure bondit et tua sans peine plusieurs Taurens. Le chef des guerriers taurens fut également abattu d'un rapide coup de lance. Puis ce fut au tour d'un kodo d'être massacré, renversant son cavalier qui périt, lui, sous les sabots du Centaure. Un lézard-tonnerre, voulant s'interposer, fut défait en une seule et mortelle passe d'armes.

Alors, le chagrin de Corneblanche se changea en colère.
Lui qui souhaitait découvrir le monde pour ensuite raconter ses voyages à sa mère, qui ne rêvait que de gras pâturages et de veillées sous les étoiles parmi son clan, lui qui n'avait pas appris à se battre se retourna pour faire face au Centaure. Sourd aux mises en garde apeurées de ses frères, il chargea avec toute la rage de son jeune cœur.
Il renversa le Centaure incrédule, mais celui-ci dans sa chute parvint à planter profondément sa terrible lance dans le ventre du kodo, là où le cuir était encore tendre, et Corneblanche s'écroula, mort avant de toucher le sol.
Mais le sacrifice de Corneblanche ne fut pas vain car, enhardis, les combattants restants profitèrent de ce que le Centaure était à terre pour l'achever.

5.
Tous s'étaient maintenant rassemblés autour du corps sans vie de Corneblanche.
On déposa la corne de sa mère, la matriarche, à ses côtés. Tandis que ses frères et sœurs pleuraient le malheur qui de nouveau les frappait, l'Esprit du Lézard-Tonnerre prononça ces paroles :
— La vengeance n'était pas le bon chemin, elle lui a coûté la vie. Mais son sacrifice nous a permis de vaincre les Centaures, les prisonniers sont libres et la Terre-Mère est joyeuse.
Alors que tous rendaient un hommage silencieux au jeune et courageux Corneblanche, ainsi qu'à ceux qui étaient tombés durant le combat, un jeune Tauren à la vue perçante poussa un cri de surprise en pointant le ciel. On vit alors arriver un gigantesque rapace, suivi par d'autres, plus petits.
Ces derniers portaient des ossements, qu'ils déposèrent délicatement sur le sol. Puis le grand rapace parla :
— Je suis l'Esprit du Grand Rapace. Là où mes enfants vivaient, ils ne trouvaient pas de nourriture et s'affaiblissaient. Lorsque nous avons vu le corps sans vie de la matriarche, nous avons demandé à l'Esprit du Grand Kodo la permission de nous nourrir de sa dépouille. Il a accepté, et nous a demandé en échange que mes enfants gardent les os et les esprits des Kodos morts. Ainsi mes enfants peuvent vivre, et ainsi les Kodos peuvent mourir en paix dans un lieu sacré, l'esprit serein. Ici sera la dernière demeure des Kodos et nous en serons les gardiens.
Depuis ce jour, des rapaces, que l'on dit sans pitié, gardent le Cimetière des Kodos de Désolace. Honorant une promesse ancestrale, ils protègent les ossements et les esprits des Kodos dans leur ultime repos.
***

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