Fan-fictions World of Warcraft.
Les Arts subtils, introduction aux magies Mythes et pensée  <    Publications     > 
V. Du Chamanisme moderne et civil.
par Macheferrac de Castagnol
Il est généralement admis que les Aspects draconiques, qui présidaient aux forces naturelles d'Azeroth, ont récemment renoncé à cette charge au profit des mortels [1]. Mais, de fait, les peuples entretenaient déjà une part de ce pouvoir depuis les temps mythiques où les Elements déchaînés furent scellés, canalisés et apaisés par les Faiseurs. Génération après génération, les mortels se sont transmis un lien réel et avantageux avec ces forces.
L'auteur recense dans ce texte les différentes classifications qui se sont établies au cours des âges, et plus particulièrement le rapport qu'entretiennent les Nains avec les éléments d'Azeroth.
Ce rapide exposé a pour ambition de mettre en regard les phénomènes chamaniques et les avancées de ces dernières années en ce qui concerne les arcanes de la matière. Nous essayerons également d'entrevoir en quoi un processus élémentaire, et donc traditionnellement "chamanique", peut être traité comme un processus alchimique. J'illustrerai cela par mes travaux sur la malédiction du roi Magni de Forgefer.
1. Généralités.
Pour situer le cadre, rappelons que ce que nous appelons chamanisme couvre diverses spécialités, dont toute distinction sera arbitraire et fonction du critère retenu.
La catégorisation la plus courante est faite entre le chamanisme élémentaire, le chamanisme progressif — plus communément dit d'améliorations, et le chamanisme de restauration. Il ne serait pas très intéressant de développer outre mesure ce classement-ci, vu sa portée essentiellement militaire, et sachant qu'il est déjà richement documenté dans n'importe quel grimoire sur le sujet.

Nous pouvons opérer une seconde distinction, selon le mode d'approche des forces naturelles par le chaman.
D'une part, un chamanisme "mystique", centré soit sur la communion avec les élémentaires — chamanisme "primordial" —, soit sur la communication avec les ancêtres qui se font intercesseurs — spiritisme —, et d'autre part, un chamanisme plus "matérialiste", focalisé sur la connaissance et la manipulation des forces minérales, et donc sur les sciences et les mancies qui s'y prêtent : géologie, hydrologie, climatologie, etc. Cette dernière approche est d'ailleurs à comparer avec la pratique élémentaliste de certains arcanistes.

Toujours selon le mode d'approche par le chaman, distinguons un chamanisme "orthodoxe" qui fait preuve d'énormément de révérence à l'égard des forces naturelles ou envers des " esprits", et un chamanisme plus "iconoclaste", pour qui l'aspect religieux et totémique n'est que superstition et enrobage culturel, et qui se tournera plus naturellement vers l'approche "matérialiste" citée plus haut.
De ce chamanisme iconoclaste, on mentionnera une dérive, appelée "chamanisme sombre", dans lequel les forces naturelles sont pliées de force, voire corrompues d'Ombre, au seul bénéfice du pouvoir personnel de son porteur, ce qui s'illustra particulièrement avec la doctrine de la "Vraie Horde" de Garrosh Hurlenfer [2].
Notons qu'une pratique "orthodoxe" n'empêche en rien la déviance vers une corruption, si les entités révérées relèvent du Vide par exemple, comme le montre l'histoire des Orcs Ombrelune [3], ou encore celle du Clan Marteau-du-Crépuscule [4].

Un troisième niveau de catégorisation doit nuancer tout ceci. En effet, la culture du chaman, celle transmise par son maître, le contexte historique et géographique qui a modelé ces cultures modifient de manière significative la précédente classification. Chamanismes tauren, marteau-hardi, pandaren, gobelin, mais aussi troll, naga, taunka, yaungol, centaure, rohart, varleu, murloc, huran, kobold, gnoll, etc. sont autant d'appropriations du lien entre un peuple et les éléments, sans oublier les chamanismes d'origine draenique, tels qu'orc, sabron, arakkoa et draeneï, en particulier. S'y attarder relèverait davantage d'un traité ethnologique, ce qui n'est pas mon propos.

Si on admet que le sacré et l'impie concernent les êtres pensants, que le druidisme se penche sur l'ordre parmi les choses du vivant, alors le chamanisme est principalement le domaine du minéral.
De ce point de vue, les pratiques chamaniques qui en appellent aux esprits-animaux seraient un encart du druidisme, voire de certains arts martiaux, telles les désormais fameuses disciplines monastiques pandarènes. C'est ainsi qu'aujourd'hui, les chamans et les druides sont distingués dans la société taurène – d'où est originaire le Cercle terrestre s'il fallait le rappeler. Néanmoins, les esprits-animaux sont constitutifs de l'histoire chamanique, et nombre de chamans ne semblent pas prêts de renoncer à les invoquer, et ce, quelles que soient les classifications institutionnelles.
Ainsi, pour réconcilier la définition précédente avec les faits, ajoutons au "monde minéral" le "retour du vivant au minéral" dans les attributs du chaman. Il est donc davantage question d'un lien que d'un champ d'étude cloisonné.
En effet, dans la majorité des sociétés, c'est le chaman qui veille à l'inhumation des défunts et à la mémoire des anciens. Le chamanisme n'est pas un concept abstrait, il est façonné par les peuples qui l'ont pratiqué. Par exemple, l'appel à l'esprit-loup Lo'gosh et des rites funéraires sont de la compétence du chaman chez les Orcs, là où ces fonctions sont dévolues aux druides ou aux prêtres dans les cultures où ils existent.
Le célèbre Cercle des Eléments, dans les terres Arathi.
2. Un point de vue nain.
Les découvertes des sites titans, comme Uldaman et Ulduar, nous ont permis de mieux comprendre l'évolution de la matière en Azeroth. Une genèse, désormais largement reconnue par les archéologues, évoque la transmutation d'organismes mécaniques — des créations des Titans façonnées dans la matrice planétaire, équivalents de nos golems — en organismes organiques. Ce changement substantifique est imputé à la dite "Malédiction de la chair", œuvre des Dieux Très Anciens, censés corrompre les corps et les esprits depuis les profondeurs des abysses.
L'étude de nombreuses tablettes antiques me laisse penser, en plus des conclusions rendues publiques par la Ligue des Explorateurs, que les Titans possédaient des connaissances et une maîtrise extrêmement poussées sur l'organisation de la matière, parvenant à un degré d'ordonnancement en comparaison de laquelle notre alchimie semble n'être qu'une tentative enfantine. Nous ne devons cependant pas tirer de conclusions hâtives de ces précieux traités antiques : le savoir titan devra être abordé selon une approche globale, et l'accident dont fut victime Magni Barbe-de-bronze [5] il y a quelques années sonne comme un avertissement.

Lorsque je fus invité, lors du Cataclysme, au "chevet" du roi Barbe-de-bronze, c'est une statue de diamant scellée dans les profondeurs de Forgefer que je trouvais, en lieu et place du roi. Selon les documents classifiés que l'on m'autorisa à consulter — et non à révéler en détail — le rituel qui provoqua ce drame implique l'absorption d'une mixture de sauge-argent des montagnes, de lotus noir et de champignon fantôme, incluant des échantillons de sol d'où ces plantes ont poussé. On note évidemment le caractère éminemment alchimique, au sens où nous l'entendons aujourd'hui, de ce rituel. Mais, au-delà de ce constat, la lecture mystique de ce procédé est assez claire : la charge métaphorique, qui consiste à mêler la phase minérale du sol à la phase organique de la plante qui en émergea, est clairement le nœud catalytique qui permet l'interversion magique chair-roche.
Comment maintenant expliquer le résultat, à savoir la transmutation de la chair du roi en diamant, et surtout, comment envisager l'élaboration d'un rituel d'inversion ? De cette question, qui me fut posée ainsi qu'à quelques confrères, je vous propose quelques raisonnements, à défaut d'une réponse complète et définitive.

Le phénomène connu qui m'est apparu se rapprocher le plus de la "diamantisation" du roi Magni est la "Forme de pierre" des Seigneurs de la montagne. La Forme de pierre, que peuvent endosser les Nains les plus en harmonie avec leur nature profonde, apparaît comme une inversion entre chair en roche : leur corps se comporte alors temporairement comme la matière même de la matrice azerothienne. On peut parler de "ré-essentialisation".
L'examen de ce phénomène m'a permis de prédire l'existence de deux constituants alchimiques ultra-primordiaux, que je nommerai le carbone et le "silicium". Le carbone est, semble-t-il, déjà largement identifié comme le constituant substantifique du bois et de la chair, ce qui l'orienterait comme hypothétique "élément des Très Anciens", en tant que composant fondamental, ou en tant que simple résidu. Le silicium, quant à lui, apparaît dans mes relevés spectraux comme étant substantifique de la plupart des roches d'Azeroth, des Terrestres, ainsi que dans de nombreux échantillons de créatures dites "de Fer" ayant conservé leur pureté titanique. Il est donc envisageable que, comme le fer, ce silicium soit un "élément des Titans", constituant le pendant du carbone.
Quoi qu'il en soit, le silicium se présente très largement en Azeroth sous forme cristalline, à la différence du carbone. J'en avais conclu que la Forme de pierre s'apparente à une transmutation alchimique, temporaire, du carbone en silicium, et donc de chair en roche.
Si Magni eût été changé en roche de silicium, nous aurions pu conclure à une Forme de pierre persistante. Or, ce n'est pas le cas, et l'examen des scories cristallines est formel : il s'agit de diamant !

Il faut alors se pencher sur la notion de cristal et son rapport aux Elements. La forme cristalline de l'eau est par exemple la glace, celle de la lave est la roche, etc. Il me semble donc raisonnable de conclure que le rituel en question a forcé le carbone de la chair du Roi à adopter une forme cristalline. Si l'eau devient glace, si la lave devient roche — autrement dit silicium cristallisé —, alors peut-être qu'en effet la chair devient diamant, en tant que forme du carbone cristallisé.

Bien sûr, dans le cas de la glace et de la roche, la simple fonte par une source de chaleur suffisante permet de sortir de l'état de cristal, ce qui n'est hélas pas envisageable concernant le roi, car elle s'accompagne d'une perte de consistance, qui lui serait très vraisemblablement fatale.
Il existe cependant des moyens arcaniques d'agir sur la matière, à la manière des mages élémentalistes. C'est cette piste que nous pourrions privilégier, dans une application chamanique et alchimique novatrice.
Comme vous l'aurez compris, j'ai emprunté la voie "matérialiste" du chamanisme pour suivre ce raisonnement et aborder le problème posé d'un point de vue purement élémentaire. J'ai conscience qu'il ne faudra pas négliger la question spirituelle et mystique : le but du rituel, malgré ses conséquences inattendues, était de fusionner le roi avec le "cœur" de sa montagne. J'ai de bonnes raisons de penser que c'est en cela qu'il s'est accompli, et que le roi a pu atteindre la transcendance. Mais cette théorie ne repose que sur une sorte d'écho depuis les plans élémentaires, une clameur lointaine encore incompréhensible. Étant dans l'incapacité d'établir une communication avec l'esprit du roi, que je suppose ainsi transcendé dans le diamant, je n'ai aucun fait tangible à apporter sur ce point.
***

[1]. L'auteur fait ici référence aux cinq Aspects draconiques, gardiens laissés par les Titans pour s'assurer du bon déroulement de la vie sur Azeroth. Affaiblis par leur combat contre Aile-de-mort, ils décidèrent de transmettre leur charge à la race humaine. Voir à ce sujet Une Brève histoire de l'arcane, de Rislon Milloin, publié dans cet ouvrage. Toutes les notes sont de l'éditrice.
[2]. Refonte de la Horde sous le règne de Garrosh Hurlenfer, recentrée sur la suprématie orque, dans une tentative de renouer avec l'époque des conquêtes de Draenor et d'Azeroth, et expurgée de ses liens avec les démons.
[3]. Voir à ce sujet l'étude De la dualité des Naaru, de Nòlmë Salossë, publiée aux Editions du Nénuphar, dans l'essai La Lumière, mythes et réalités.
[4]. Ancien clan orc de sinistre mémoire, longtemps dirigé par l'Ogre Cho'Gall, aujourd'hui devenu une secte multiraciale adorant les Dieux Très Anciens, désireuse de replonger le monde dans le chaos.
[5]. Héros de la deuxième guerre et roi du peuple nain, siégeant sous le montagne de Forgefer jusqu'aux événements du Cataclysme.

L'auteur tient à remercier tout particulièrement :
Sheamùs O'Shaunessy, vérificateur des faits, pour le classement des documents et références.
- Les savants, le personnel et les habitants de Forgefer, pour leur hospitalité et leur confiance ;
- Ajaxandriel Givreciel, seigneur thalassien, Tahajmul d'Argus, cosmologiste et Mellada, artiste, pour leurs apports en cristallographie.
- Et bien sûr mon collègue Arthémidore de Corbeaulieu, pharmacien et ésotériste, pour ses travaux sur la sauge-argent des montagnes.

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