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Légendes de la Terre-Mère par Zagethia Hache-Vive Contes et légendes du monde  <    Publications     > 
II — Le Peuple kodo
Il y a bien longtemps, sur les terres de Mulgore, une tribu maintenant oubliée était dirigée par une Taurène très âgée, un peu sourde et presque aveugle, mais toujours attentive aux besoins des siens. Son petit-fils, dont les cornes commençaient à peine à pousser, allait bientôt entrer dans l'âge adulte.
— Jeune Shu'alo, lui confia-t-elle, tu le sais, le printemps de ta vie se termine. Le temps est venu pour toi de devenir un adulte. Le mien est bientôt terminé, et ce sera à toi de prendre ma place.
Le jeune Tauren inclina la tête en signe d'approbation car il n'osait pas interrompre l'ancienne.
— Tu connais la coutume, continua la matriarche d'une voix un peu trop forte, il est d'usage que les jeunes veaux passent une série d'épreuves, qui flattent les guerriers en herbe, mais sont inutiles pour la tribu. Ne perds donc pas ton temps dans ces jeux vains, et va plutôt nous trouver un animal qui accepterait de nous porter, nous, nos campements et nos totems, quand nous parcourons les prairies, et qui accepterait de nourrir la tribu en cas de famine. Pars maintenant, fils de mon fils, et va nous trouver cet animal rare.
Le jeune Tauren hochait toujours la tête, mais l'angoisse commençait à monter en lui. Il ne savait pas du tout comment il allait bien pouvoir s'acquitter de cette mission, qui assurerait le bien de la tribu et lui permettrait peut-être d'en devenir le chef. Aussi se retira-t-il dans son tipi et, tandis que Mu'sha [1] veillait avec bienveillance parmi les étoiles sur le sommeil des Shu'alo, il pria avec la ferveur du désespoir la Terre-Mère, afin qu'elle lui vienne en aide.

Le lendemain, résigné à accomplir son destin ou à mourir, le jeune Tauren parti, armé d'une lance, quelques fruits séchés dans sa besace.
Après une journée de marche, il atteignit les grandes plaines. Avisant un arbre qui offrait un peu d'ombre, il s'y adossa et s'endormit, exténué.
Lorsqu'il s'éveilla, il faisait nuit noire, mais il n'était pas tout à fait au même endroit. Il reconnaissait la région, mais pas l'arbre contre lequel il s'était assoupi. Malgré le ciel clair et la lune brillante, une sorte de brume s'étirait dans la plaine. Soudain, il se rendit compte que son esprit était séparé de son corps ! Il fut pris de panique, car il savait très bien que s'il ne rejoignait pas son corps avant qu'An'she n'apparaisse, il ne pourrait jamais le retrouver. Au fond de lui cependant, une certitude grandit peu à peu, et il sut que c'est sous cette forme-là, éthérée, qu'il accomplirait sa quête, ou échouerait.

Après une courte errance, il rencontra un trotteur, bien plus grand que ceux qu'il connaissait, et dont la silhouette d'argent évanescente foulait la prairie à grands bonds. Il reconnut sans peine l'esprit du Grand Trotteur, et le héla.
— Ô esprit du Grand Trotteur, je suis perdu, mon corps est loin, et je dois le rejoindre avant le lever du jour. Pourrais-tu m'aider ?
— Homme-taureau, tu es bien trop lourd ! répondit celui-ci en baissant la tête. Et mes enfants seraient assurément bien incapables de vous aider.
Puis, devant la surprise du Tauren, l'esprit éclata d'un rire caquetant, et reprit :
— Je connais ta mission, jeune Shu'alo, tout le monde ici la connaît. Je sais que tu cherches un compagnon qui t'aidera, toi et ta tribu. Mes enfants ne pourront qu'aider tes chasseurs, c'est tout. Maintenant, va et poursuis ta route car, comme tu l'as dit, le temps presse et tu dois retrouver ton corps avant l'aube.
Et l'esprit s'éloigna, disparaissant, comme emporté par la brume. Le jeune Tauren ne perdit cependant pas courage. Un peu plus loin, c'est un immense lion, éthéré lui aussi, qu'il rencontra. Un esprit qu'il connaissait déjà.
— Ô esprit du Grand Lion, lui dit-il, mon esprit et mon corps sont séparés. Je dois les réunir. Pourrais-tu m'aider ?
L'esprit le regarda, et une lueur de tristesse passa dans son regard plein de sagesse.
— Jeune Shu'alo, ta quête est importante, elle peut te coûter la vie. Je voudrais bien t'aider, mais je crains que mes enfants et moi ne puissions rien pour toi. Néanmoins, nous sommes liés toi et moi, puisque je suis ce que vous appelez ton animal totem. Lors de notre première rencontre, je t'ai donné ma bénédiction et t'ai dit que je te protégerais. Aussi vais-je me joindre à toi.

Ainsi donc, accompagné de l'esprit du Lion, le jeune Shu'alo se remit en route. Mu'sha commençait à descendre dans le ciel, il ne lui restait que quelques heures. Bientôt, ils rencontrèrent l'esprit de la Grande Hyène. Les deux esprits animaux se saluèrent longuement, suivant la coutume des esprits, puis il fut permis au jeune Tauren d'exposer sa requête.
— Ô esprit de la Grande Hyène, dit-il, un peu rassuré par la présence du Grand Lion à ses côtés, sans doute connais-tu déjà ma quête. Pourrais-tu m'aider ?
— Jeune Shu'alo, répondit la Grande Hyène en donnant l'impression de sourire, comme ceux du Trotteur et du Lion, mes enfants se sont pas assez forts pour les hommes-taureaux. Je sais que tu as peu de temps devant toi, alors je vais moi aussi t'accompagner, car il est du devoir des Esprits de venir en aide aux enfants de la Terre-Mère, et je connais quelqu'un qui pourra peut-être porter ton peuple.
Le petit groupe se mit en route, le grand lion marchait devant avec la grande hyène, prenant chacun des nouvelles de leurs nombreuses et turbulentes familles respectives. Le jeune Tauren, dont l'espoir s'amenuisait malgré la bonne fortune de ces rencontres, suivait.
 
Ils arrivèrent ainsi près d'une haute montagne. A ses pieds était allongée une gigantesque créature, et, lorsqu'elle se leva lourdement pour saluer les arrivants, elle masqua presque complètement la montagne tant elle était énorme. Sa voix grave et profonde fit trembler le sol.
— Bienvenue à toi, Grande Hyène, bienvenue à toi, Grand Lion, et bienvenue à toi, Shu'alo. Je suis le Grand Lézard-Tonnerre, et le vent m'a parlé de ta quête. Certes, mes enfants sont suffisamment grands et forts pour porter ton peuple, mais nos écailles, ainsi que la foudre qui nous protège, vous blesseraient.
Dans le silence qui suivit, le jeune Tauren regarda Mu'sha qui allait bientôt terminer sa course nocturne, puis baissa la tête en laissant échapper un soupir de découragement.
— Jeune Shu'alo, reprit le Grand Lézard de sa voix grondante, la Terre-Mère est fertile, elle a une multitude d'enfants et tu ne dois pas douter d'elle. Peut-être a-t-Elle voulu attendre la bonne personne pour rencontrer un de Ses enfants, ou peut-être le moment est-il venu. Qui peut connaître Sa volonté et Ses désirs ? Il existe un animal qui n'est qu'une vague légende pour vous, et pourtant vous partagez plusieurs traits de caractère. Calmes et sereins, mais impitoyables au combat. Allons voir l'esprit du Grand Kodo, je suis sûr que lui pourra t'aider. Suivez-moi.

Et, une fois de plus, le groupe se mit en route, cette fois accompagné du grand lézard-tonnerre. Ils atteignirent enfin une grande prairie verdoyante. Le calme y régnait, mais la lune allait bientôt toucher l'horizon. Une immense créature les attendait, aussi grande et impressionnante que le lézard-tonnerre, mais sans écaille sur le dos.
— Jeune Shu'Alo, dit-il avec une voix aussi grave et profonde que celle du lézard-tonnerre, mais moins rocailleuse, je t'attendais. La Terre-Mère nous a enfin réunis.
— Ô esprit du Grand Kodo, s'inclina le Tauren, tu existes vraiment alors ?
— Bien sûr, et mes enfants aussi ! Si tu le désires, ils pourront porter les tiens, les aider à transporter leur campement, et même les nourrir en temps de famine. Mais ton peuple aura un devoir : nous protéger et nous traiter en égal.
— Qu'il en soit ainsi, Grand Esprit, je m'y engage au nom de mon peuple. Un serment nous lie désormais.
— Shu'alo, intervint le lion, An'she va bientôt apparaître, tu devrais rejoindre ton corps au plus vite.
— Il a raison, renchérit le Grand Kodo, monte sur mon dos, je vais t'y amener.
— Puisse la Terre-Mère te montrer le chemin de la sagesse, dit le grand Esprit du Lézard Tonnerre.
— Mène ton peuple dans le respect de Terre-Mère, ajouta la Grande Hyène.
— Je serai toujours à tes côtés, confia le Grand Lion.
Puis le kodo s'élança, d'abord lourdement, puis gagnant de la vitesse à chaque pas, semblant flotter silencieusement au-dessus du sol, malgré sa taille. Bientôt, ils arrivèrent près de l'arbre contre lequel le Tauren s'était adossé, alors que le ciel commençait à rosir et que le dernier éclat de Mu'sha disparaissait derrière les collines.
Le jeune Tauren descendit prestement du dos du Grand Kodo. Il le remercia de tout son cœur, et promit de prendre soin des kodos comme s'ils étaient ses propres frères.

Enfin il se réveilla pour de bon. Pas loin de lui, silencieux, se tenaient une hyène, un lion des savanes et un lézard-tonnerre. Tous trois avaient veillé sur son corps. Reconnaissant les enfants des esprits qui l'avaient aidé, il s'inclina avec un grand respect devant chaque animal, puis ceux-ci s'en retournèrent à leurs occupations.
S'il avait bien récupéré son corps et marchait de nouveau dans le monde que nous connaissons, il n'était pas certain pour autant d'avoir accompli sa quête. Alors qu'il se demandait s'il devait retourner au campement de sa tribu, il sentit la terre trembler. Un troupeau de kodos venait vers lui avec, à sa tête, une grande femelle âgée, la matriarche sans aucun doute. Un jeune mâle aux muscles puissants s'approcha de lui et se baissa pour qu'il puisse monter sur son dos.

Et c'est ainsi que, accompagné d'un grand troupeau de kodos, le futur chef revint dans sa tribu, non sans une évidente fierté. Là, il fut accueilli par sa grand-mère, qui, sans hésiter, se dirigea vers la matriarche kodo.
— Nous nous rencontrons enfin, ma sœur, murmura-t-elle en passant sa main derrière la corne. Nous vivrons nos derniers temps ensemble avant de rejoindre nos ancêtres. Puissent les jeunes Shu'alo perpétuer la tradition. Que pour longtemps encore, notre vie soit rythmée par les saisons qui passent, la bénédiction de la Terre-Mère, et la compagnie du noble kodo.
[1]. Les Taurens vénèrent la Terre-Mère, ainsi que le Père Ciel, même si cela est moins connu. La Terre-Mère a deux yeux, l'œil droit, An'she, le soleil, et l'œil gauche, Mu'sha, la grande lune blanche. Les Taurens et les Kaldorei ont rencontré Cenarius, et chez ces deux peuples, il est le fils de Malorne, le grand cerf blanc nommé Apa'ro chez les Taurens, et d'Elune, ou Mu'sha. Note de l'auteur.
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