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IV. Cendres et Lumière, aperçu de la survivance de l'esprit dans la culture draeneï.
par Flavien d'Archambaut, d'après les notes du père Béranger d'Archambaut
Bien qu'ayant rejoint l'Alliance il y a une décennie, la culture draeneï demeure fort mal comprise par la civilisation humaine. La grande différence d'espérance de vie entre ces deux peuples induit immanquablement une grande divergence de perception de l'univers et de ses mystères.
Par ailleurs, si les Humains n'osèrent peut-être pas s'imprégner du mysticisme draeneï, les Draeneï restèrent quant à eux fort peu loquaces quant à leur compréhension du monde, peut-être par pudeur ou par volonté de ne pas bouleverser les cultures alliées de leur nouveau monde refuge. Bien que narré selon une vision humaine, ce texte est l'un des rares manuscrits témoignant de la sagesse spirituelle draeneï et de ses sentiments face à l'au-delà. Avertissement de l'auteur.
Le texte qui suit fut rédigé à partir des notes éparses de feu mon frère Béranger d'Archambaut, prêtre de la Sainte Lumière et un temps affecté au diocèse du chapelain de notre bon roi Anduin Wrynn. Lorsqu'en l'an 31 le jeune prince s'en alla parfaire son éducation religieuse auprès du Prophète Velen sur l'île de Brume-azur, Béranger l'accompagna, préférant fuire les querelles intestines de l'Eglise de Hurlevent.
Le prince Anduin n'était alors pas envoyé par son père le Roi Varian, et sa visite n'avait par conséquent aucun caractère officiel ; aussi lui fut-il épargné une escorte de légats. Ayant aparavant effectué plusieurs voyages d'étude en Outreterre, les connaissances de la langue et de la pensée draeneï de Béranger furent donc sollicitées, et même mises à rude épreuve, afin qu'une claire et entière compréhension de l'enseignement du Prophète soit retranscrite. Il me peine d'avouer que, si mon frère manifestait une foi sans faille, ainsi qu'un complet dévouement à la Couronne, il restait un piètre traducteur, et hélas un déplorable archiviste. Aussi, l'on voudra bien pardonner les inévitables approximations, omissions, erreurs, voire les contresens, qui pourraient parsemer ce texte. Aperçu de la survivance de l'esprit dans la culture draeneï.
Il convient de rappeler que les Draeneï se montrent extrêmement discrets quant à leurs croyances se rapportant à ce que nous appelons l'au-delà. Les premiers prêtres Humains qui rencontrèrent ce peuple habité par la Lumière y virent la volonté de cacher quelques secrets primordiaux à des étrangers non initiés. Il apparaît bien au contraire qu'à l'image du Prophète, les Draeneï sont prêts à partager sans compter leurs connaissances, et que leur réserve n'est due qu'à une extrême humilité face aux mystères de la Sainte. Conscients des limites de leurs connaissances, ils préfèrent un silence prudent, plutôt que d'échafauder des théories multiples, bavardes et complexes.
Peuple mystique, les Draeneï vivent la Lumière au quotidien grâce à leur lien avec les Naaru, et cela semble leur suffire. Seul le Prophète, par la méditation prolongée et la puissance de ses visions, pourrait avoir entrevu la pleine réalité de la Lumière dans l'ordre cosmologique. Il reste cependant lui aussi peu disert sur ce sujet. Maintes fois interrogé, il répondit par l'un des aphorismes qu'il affectionne qu'il était déjà suffisamment ardu de comprendre la vie, et qu'il serait toujours temps de s'atteler au problème de la mort lorsque celle-ci surviendrait. Il rappela par ailleurs que son peuple, impitoyablement pourchassé par la Légion, puis massacré par leurs forces corrompues, avait eu durant les derniers millénaires des problèmes plus urgents à résoudre. Certains pourront arguer que ces belles paroles sont aisées de la part d'un peuple à la longévité indéfinie. De fait, il est certain qu'aucun Draeneï n'est en proie à l'angoisse de manquer de temps pour tracer son propre chemin, qu'il mène à de grandes choses ou à une vie simple. L'on sait que les Draeneï attachent une grande importance à la vie, sous toutes ses formes, et ce quelle que soit l'approche religieuse ou philosophique que l'on en ait. Vivre simplement et pleinement la vie au quotidien, dans le respect de l'enseignement des Naaru, voilà ce qui satisfait un Draeneï, qu'il soit berger, forgeron, guerrier ou exarque [1]. Ceci contribue à expliquer d'une part l'apparente légèreté dont ce peuple fait parfois montre dans sa vie quotidienne, et d'autre part l'application, voire la concentration la plus extrême, que l'on pourra observer aussi bien chez le fermier réparant une clôture, chez le Redresseur de Torts répétant inlassablement la même passe d'armes que chez le prêtre accordant un délicat cristal. Malgré leur attachement à la plénitude du moment présent, la plupart des Draeneï envisagent leur mort avec un détachement serein. Ils semblent convaincus que la Lumière prendra soin de leur essence, concept ésotérique dont l'équivalent pourrait être "l'âme", "l'esprit" ou "la conscience". Avancer des hypothèses quant à la manière précise dont la Lumière prend soin de ses enfants relève pour eux de vaines conjectures théologiques, tout juste bonnes à occuper un jeune anachorète mal dégrossi durant les premiers siècles de sa retraite. Pour cette raison, les rites funéraires draeneï sont réduits à une simple cérémonie familiale, à laquelle sont conviées de préférence les proches, mais où le voyageur de passage sera invité s'il en exprime le désir. Il ne semble pas y avoir de danses ou de formules consacrées, qui pourraient aider l'essence du défunt à trouver son chemin dans un autre monde. En effet, tout rituel servant de rite de passage semble superflu pour un peuple qui vit la Lumière de manière mystique par l'intermédiaire des Naaru. Cependant, une coutume encore vivace dans certaines régions prévoit de placer une couverture sur le corps du défunt, de préférence une peau de talbuk, à condition qu'aucun sacrifice ne soit nécessaire. Les raisons de cette pratique, parfois nommée an'dishiinaï [2] ne nous sont à ce jour pas connues. L'on procédera ensuite à la crémation du défunt, au matin de préférences, à la lumière naissante de l'aube. Les cendres sont dispersées au vent, ou répandues sur les champs avoisinants, si possible. Enfin, lorsque la famille ou les proches en expriment l'envie, une stèle simple en pierre sera érigée non loin de là où vivait le défunt. Aucun temps de deuil n'est à observer, la peine et la tristesse étant pour eux affaire personnelle. Les rites funéraires ne font nul cas de sépultures, et encore moins de mausolées, à l'exception de la grande nécropole d'Auchindoun, sur laquelle nous reviendrons. En effet, il est admis que la Lumière, dans son éternelle puissance, saura toujours retrouver l'essence de ses enfants, où qu'ils aient péri, et n'a par conséquent nul besoin de signes ostentatoires de la présence d'un mort, ni bien évidemment d'inhumations. Parmi les moins érudits des Draeneï, certains comptent sur l'infinie bienveillance des Naaru pour servir de guides, voire d'intercesseurs, à l'essence du défunt, dans le cas où celui-ci aurait mené une vie écartée des chemins de la Lumière. Seules les âmes des Chevaliers de la Mort demeurent hors de portée de la Lumière, puisque des fragments de celles-ci sont prisonniers entre autres de leurs épées runiques. C'est d'ailleurs pour cette raison que les Draeneï exècrent et condamnent cette pratique impie, car enfermer une âme dans le corps d'un mort ou d'un artefact en prive la Lumière. La simplicité extrême de ces pratiques funéraires prend tout son sens si l'on considère que les Draeneï n'envisagent pas une vie individuelle après la mort. L'essence du défunt rejoindrait la Lumière pour s'y fondre, et imaginer qu'elle perdure en une individualité qui conserverait une expérience et des souvenirs précis de son passage dans notre monde relève pour eux de la plus grande arrogance. Bien que ce peuple soit profondément religieux et qu'il ait existé plusieurs monastères dans lesquels était dispensé un enseignement théologique et philosophique, l'absence d'un clergé bien défini laisse à chaque individu le soin de développer ses propres croyances quant à la question d'une vie après la mort, parfois appelée eschatologie individuelle. De la sorte, il est généralement admis que leur essence leur a été pour ainsi dire été "confiée" par la Lumière du temps de leur vie dans ce monde et ne leur appartient pas en propre. N'en étant que les dépositaires temporaires, il est donc juste et équitable de la "rendre" à la mort, comme l'on ramène un griffon emprunté au maître-griffonier après un trajet. "Né de la Lumière, tu retourneras à la Lumière", telle pourrait être résumée la pensée draeneï. Champ de stèles funéraires à Nagrand, Outreterre.
La réincarnation d'une âme n'est pas envisagée, mais nul ne pourra par ailleurs douter de l'existence des "esprits", présences fantomatiques dotées de pouvoirs plus ou moins importants dans le monde des vivants, et manifestant des attitudes amicales et hostiles. Ces manifestations, qui possédent certains souvenirs d'une vie matérielle et une existence propre, sont considérées par les Draeneï comme la personnalité, les "restes", de défunts. En effet, la pensée draeneï considère que chaque individu est composé d'une essence — la part lumineuse, l'âme —, et d'une ou plusieurs personnalités. Ces personnalités se développent en même temps que l'individu grandit et apprend. Ainsi, les personnalités seraient le reflet de l'essence agissant dans notre monde. En retour, les personnalités influenceraient pour une certaine part l'essence. De cette manière, on peut considérer que les personnalités d'un individu permettraient à l'essence de s'incarner, mais il ne s'agit là peut-être que spéculations hasardeuses, les notes en ma possession étant particulièrement fragmentaires sur ce point, et nos connaissances en ce domaine de plus haut mysticisme n'ayant pas progressé depuis les entretiens du jeune Anduin Wrynn avec le Prophète. Le lecteur souhaitant aller plus avant pourra se reporter à l'ouvrage La Quatrième porte de l'anachorète Gurdanaar [3], disponible à la grande bibliothèque de Shattrath.
Quoi qu'il en soit, suivant la pensée draeneï, les esprits qui hantent certains lieux seraient un aspect de l'une des personnalités des défunts, dont les circonstances particulières de la mort — le plus souvent dramatiques et violentes —, n'auraient pas permis la réalisation d'un processus normal. En effet, lors d'un décès survenant dans des conditions ordinaires, l'essence retourne à la Lumière, et les personnalités disparaissent, ne laissant que la dépouille du défunt. Dans certains cas cependant, en particulier lorsqu'une magie du Vide est à l'œuvre, l'une ou plusieurs des personnalités du défunt conservent une sorte d'existence dans notre monde, figées avec les souvenirs précédant le décès, et errant non loin de l'endroit où l'essence a rejoint la Lumière. Ceci pourrait expliquer les attitudes parfois hostiles et parfois bienveillantes de ces esprits, dont on ne sait jamais s'il faut s'en garder ou s'y fier. Il existerait cependant de saints rituels, fort complexes, permettant aux vivants de rendre un dernier repos à ces esprits. A ce sujet, le Prophète aime à rappeler que "tout ce qui erre n'est pas perdu". Quiconque a voyagé aux abords d'Auchindoun, en Outreterre, aura été mis en garde contre les très nombreux esprits belliqueux qui rôdent aux alentours de la Nécropole. Ces esprits sont nés des conditions très particulières régnant autour de cet étrange édifice. Rappelons qu'Auchindoun a été bâti autour du sarcophage renfermant le Naaru D'Ore, blessé lors de la chute du vaisseau Génédar sur l'Outreterre. Pour une raison mal connue, les survivants inhumèrent leurs frères et sœurs ayant péri lors de cette catastrophe dans la nécropole, à proximité du Naaru. L'édifice terminé, il fut protégé par une barrière magique, sans doute afin que de les préserver de toute corruption, et l'ordre des prêtre-gardiens Auchenaï fut créé, afin de veiller sur les dépouilles et d'étudier le Naaru qui traversait un long cycle d'ombre. Il semble alors que la présence du Naaru D'Ore soit à l'origine de la présence des esprits des nombreux corps draeneï ensevelis, mais les avis divergent profondément sur ce point, d'autres sources invoquant la présence sournoise et infiltrée du Conseil des Ombres. Plus tard, lorsque les Orcs corrompus par le sang du seigneur Mannoroth menèrent une guerre sans merci contre le peuple draeneï et qu'Auchindoun fut détruit, les Auchenaï rescapés sombrèrent dans la folie, sans doute sous l'influence conjuguée de la corruption et des puissantes vagues d'ombre émises par D'Ore. Il est en effet admis que, durant sa régénération [4], le Naaru dévorait les esprits alentour, et ce sans regard de la race. Par ailleurs, les Draeneï employèrent les personnalités de certains de leurs plus valeureux Redresseurs de Torts afin de commander des guerriers mécaniques, suivant une technique ancienne venant de leur passé sur Argus, leur monde natal. Ceci ne pouvait bien évidemment être réalisé qu'avec l'accord de l'individu du temps de son vivant et pouvait représenter la sublime continuation d'une vie de défenseur au service de la Lumière. En conclusion, de par leur pacte avec les Naaru, le mysticisme draeneï offre une vision d'un au-delà inséparable de la Sainte Lumière, sans que cela nécessite de rites particuliers. Pour ce peuple, nous ne sommes que les humbles dépositaires de ce que nous appelons âme, le temps de notre existence sur ce monde, qui retournera se fondre dans la Lumière à l'heure de notre mort. Par conséquent, il est vain et prétentieux d'imaginer une vie individuelle après la mort. Les esprits, quant à eux, ne sont pas des manifestations naturelles d'ancêtres ou d'une mystérieuse force cosmique, mais des accidents circonstanciels dont le plus manifeste exemple est la nécropole d'Auchindoun. Suivant cette pensée, on peut raisonnablement penser que de nombreux esprits hantent les anciens lieux sacrés d'Argus. Bien évidemment, la réserve naturelle des Draeneï quant à ces questions, ainsi que le peu d'études réalisées sur ce sujet ne nous permettent pas d'être certains de notre pleine compréhension des ces mystères, et il pourra être fort utile d'approfondir cette réflexion par de plus amples entretiens avec le Prophète Velen, en des temps plus paisibles. ***
[1]. Titre honorifique autrefois utilisé signifiant littéralement "celui qui a lu [étudié] les textes sacrés". Toutes les notes sont de l'éditeur.
[2]. La pratique de l'an'dishiinaï fut prématurément traduite par "peau de départ", du fait d'une fâcheuse homonymie. Cette traduction est bien évidemment erronée. [3]. Parfois traduit sous le titre La Quatrième chambre. A ne pas confondre avec Les Sept voies, recueil traitant des arts amoureux, également disponible à la grande bibliothèque de Shattrath. [4]. Voir à ce sujet l'ouvrage Jardin de Pierre de Marieka Van-Horn, paru aux Editions du Nénuphar.
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